5 mars 25013 Mobilisation réussie contre l’accord de la honte

, par Udfo15

Hier mardi 5 mars 2013, 300 manifestants ont répondu à l’appel de Force Ouvrière et de la CGT, soutenu par la FSU, et se sont rassemblés Place des Carmes à Aurillac pour participer à la manifestation contre l’Accord National Interprofessionnel signé le 11 janvier 2013 par le MEDEF, la CFDT, la CFTC et la CGC.

De nombreux salariés du secteur privé étaient présents, répondant pour certains aux appels communs FO / CGT à des débrayages. Des salariés d’Auriplast, de Qualicosmétics, de Pyram, des Menuiseries du Centre, des Fromageries Occitanes, des Organismes de Sécurité sociale, des services de l’Action Sociale, de la Poste étaient là ; mais aussi des salariés du secteur public de l’Hôpital, de l’enseignement...

Après un défilé dans les rues du centre ville d’Aurillac, la manifestation s’est terminée devant la préfecture.

Deux prises de parole ont eu lieu, avant qu’une délégation ne soit reçue en préfecture. Vous trouverez ci-dessous la déclaration faite par Jean-Vincent BOUDOU, au nom de l’Union Départementale Force Ouvrière.

Chers camarades,

Dans les soi-disant nouveaux droits acquis l’article 4 de cet accord nous vante la surcotisation des CDD comme l’arme fatale contre les contrats précaires. En voilà une grande annonce !

Certes si le taux de cotisation pour les CDD de moins d’un mois passe de 4 à 7%, ce qui représente pour l’employeur une augmentation de 42,90 € / mois dans le cadre d’un SMIC à temps plein, qui peut croire à l’effet dissuasif de cette mesure ?

Le plus fort c’est que celle-ci ne s’appliquera pas aux CDD de remplacements, ni aux CDD saisonniers, ni aux CDD d’usages, ni aux CDD transformés en CDI, ni aux missions d’intérim, en définitive cette mesurette n’impactera qu’à peine 16% de la masse salariale des contrats courts.

En contrepartie le patronat a négocié le bénéfice durant trois mois, de nouvelles exonérations de cotisation sur l’embauche de jeunes de moins de 26 ans à l’issue de leur période d’essai. Ainsi, compte tenu des volumes en présence entre CDD soumis à la surcote et les CDI exonérés de cotisation durant trois mois, le différentiel permet au patronat de récupérer pas moins de 45 millions d’euros par an ! Pour une avancée c’est une belle avancée…patronale, on peut comprendre qu’ils soient sortis de cette négociation avec le sourire.

Mais il y a plus grave encore avec la création d’un CDI « intérimaire ». Véritable CDI au rabais, il installe de fait les salariés dans la précarité en supprimant notamment leurs droits d’accès à l’assurance chômage entre deux missions.

L’article 20 est de la même veine. Il aurait pu s’intituler comment faciliter les licenciements au moindre coût aujourd’hui, pour peut-être embaucher demain, après-demain voire jamais…

En quelques lignes, il supprime purement et simplement deux sections entières du Code du Travail relatives à la protection des salariés en cas de licenciement économique. Ces sections pourront être remplacées par un document produit par l’employeur et homologué par le Directeur Régional des Entreprises de la Concurrence de la Consommation du Travail et de l’Emploi. (DIRECCTE)

Une non réponse de sa part dans un délai de 21 jours vaudra acceptation ! Vu l’état de l’Administration après 5 ans de RGPP, et une amplification de celle-ci avec la Modernisation de l’Action Publique (que l’on peut aussi appeler RGPP +) il y a fort à craindre que les patrons ne soient pas trop inquiétés de ce côté-là.

L’employeur pourra donc établir directement et unilatéralement son propre document, faisant office de Plan de Sauvegarde de l’Emploi et ainsi décider seul des délais de consultation, de la possibilité ou non de recours à un expert, des modalités, critères et conditions de reclassements éventuels, du contenu et du niveau des aides à l’accompagnement.

De plus l’employeur pourra fixer l’ordre des licenciements en se basant sur la « compétence » professionnelle du salarié qui par nature est une valeur des plus subjective et qui sera évaluée par on ne sait qui. Ainsi sont mis à bas les critères protecteurs et objectifs : charges de familles, ancienneté, capacité de réinsertion, qualité professionnelle apprécié par catégorie, que la loi imposait jusqu’à maintenant.

Dans une telle situation les salariés se retrouveront confrontés à une loterie arbitraire et cruelle là où dans une situation forcément douloureuse, on s’attachait jusqu’alors à protéger les salariés les plus fragiles, ou qui se trouvaient en grande difficulté pour retrouver un emploi indépendamment de leur compétence.

Nous le voyons, la philosophie de cet accord vient tout droit de l’Union Européenne, c’est la « flexisécurité » qui signifie : plus de flexibilité pour les salariés, plus de sécurité pour les employeurs !

D’ailleurs il faut noter que la Commission européenne et l’agence de notation Standard & Poor’s se félicitent de cet accord dont elles considèrent, pour la première, qu’il s’inscrit dans la volonté de réduire les déficits et de flexibiliser le marché du travail, et, pour la seconde, de rassurer les marchés financiers.

Dans ce cadre, toutes les branches et les conventions collectives nationales sont en danger. Le patronat souhaite que la négociation ne se situe plus qu’au niveau de l’entreprise ; c’est tenter de faire croire qu’un salarié est en position d’égalité devant son patron !

Dans un pays qui à ce jour compte plus de 9 millions de sans emploi et de travailleurs pauvres le gouvernement, répondant fidèlement aux injonctions du FMI, de l’Union Européenne et de la Banque Centrale Européenne avait appelé de ses vœux un compromis historique entre patronat et organisations syndicales concernant « la sécurisation de l’emploi ».

Il n’a obtenu qu’une compromission historique de certains, pour un accord préhistorique !

FORCE OUVRIERE, comme la CGT, ont refusé ce marché de dupes et c’est une bonne chose : dans les pays où les organisations syndicales sont rentrées dans des « pactes sociaux », les conséquences ont été dramatiques pour les travailleurs et ce n’est pas cet accord de la honte qui fera exception.

L’action commune sur des revendications communes et claires, c’est ça la voie de l’efficacité ! Aujourd’hui il s’agit d’interpeller nos élus, mais au-delà, c’est aussi un premier jalon interprofessionnel dans la lutte contre l’austérité que le gouvernement vient ajouter à la rigueur.

Alors oui, il appartient aux travailleurs et à leurs organisations syndicales de combattre l’austérité par tous les moyens, y compris la grève quand il le faut.